Le papillon monarque : l’insecte « porte-parole » de l’été au parc Scowen

Written by Jessica Adams (Nature Nerding)
Reading time: 5-6 minutes

(Ph : Guillaume Levesque) Bien que nous n’ayons pas eu la chance de trouver des œufs ou des chenilles de monarque au parc Scowen, Guillaume Lévesque et sa famille ont repéré cette petite chenille après notre « Journée de déménagement du monarque ». Pour reprendre ses mots : « C’est intéressant parce qu’elle était sur le plant [d’asclépiade] le plus près de la route! Merci d’avoir aiguisé notre sens de l’observation! »

Un projet qui a mis des mois à se réaliser a officiellement pris fin le 7 septembre lorsque le papillon monarque du parc Scowen a été relâché dans la nature. Enchantés d’avoir participé à un projet aussi extraordinaire, les membres de notre Brigade papillons sont très reconnaissants pour tout ce qu’ils ont vécu et appris cette année, et ils réfléchissent déjà avec enthousiasme à la suite du projet l’an prochain…

Le projet pour les papillons monarques de la Fondation Massawippi, coordonné par Nature Nerding, se déroulait pour la première fois cette année au mois de juillet. Nous avions comme principaux objectifs de sensibiliser les gens aux champs d’asclépiade à l’entrée du parc Scowen, de recueillir des données sur la présence des monarques dans le parc et d’installer une pouponnière à papillon afin d’immortaliser et de partager la magie de la métamorphose. Nous ne pourrions pas être plus heureux de la façon dont les choses se sont déroulées.

 

 

 

 

 

Rappel : pourquoi un projet pour les monarques?

Le papillon monarque (Danaus plexippus) a vu sa population diminuer de 80 % au cours des dernières décennies et a été classé parmi les espèces menacées. Il est loin d’être le seul insecte important dans un écosystème et, malheureusement, il n’est pas du tout le seul à être confronté à des difficultés. Toutefois, du point de vue de vue de la conservation, le choix de braquer les projecteurs sur certaines espèces clés se justifie.

Dans le cas du monarque, il y a plusieurs raisons. Premièrement, il est considéré comme une espèce parapluie, ce qui signifie que les mesures prises pour le protéger peuvent avoir un impact sur diverses autres espèces partageant le même habitat ou certaines des mêmes exigences pour la survie. Deuxièmement – et la plupart d’entre nous qui avons eu le privilège de rencontrer ce papillon peuvent en témoigner – le monarque est réellement fascinant. Ses couleurs frappantes, son cycle de vie complexe et sa migration épique vers le sud nous poussent à vouloir en savoir plus sur cette espèce charismatique et à participer à sa protection. Ensemble, ces éléments font du monarque le parfait insecte « porte-parole » pour sensibiliser la population aux efforts de conservation de la petite faune et encourager la participation à ces efforts.

 

La Brigade papillons et le cycle de vie du monarque

La première rencontre de notre Brigade papillons a eu lieu au début juin, et une poignée de bénévoles dévoués se sont rencontrés aux deux semaines pendant les deux mois suivants pour mener à bien le projet.

Abritant diverses espèces de fleurs sauvages indigènes, les champs du bas qui flanquent l’entrée du parc Scowen forment un habitat incroyablement précieux pour une variété d’espèces sauvages. L’abondance de l’asclépiade dans ces champs est particulièrement intéressante, car cette humble plante est essentielle au cycle de vie du monarque. Lors de notre première réunion, nous avons donc commencé par apprendre à la reconnaître.

Il s’agit d’un point central du projet, car c’est la seule plante dont se nourrit la chenille du monarque, ce qui la rend essentielle à la reproduction du monarque. Bien qu’il existe plusieurs espèces d’asclépiade, la seule présente à Scowen est l’asclépiade commune (Asclepias syriaca). Après avoir pris note de l’apparence, de la texture et de l’odeur de l’asclépiade commune, nous avons délimité quelques sites de collecte de données dans les champs.

À la réunion suivante, nous avons appris le cycle de vie du monarque et une méthode de collecte de données. Comme la chenille du monarque se nourrit exclusivement d’asclépiade, le papillon adulte pond ses œufs sur cette plante. Il y a généralement un œuf par plante et on le retrouve le plus souvent en dessous des feuilles duveteuses. De la taille d’une tête d’épingle, ces œufs peuvent être difficiles à repérer et sont souvent confondus avec autre chose, comme une goutte de sève d’asclépiade solidifiée. Inutile de dire que la collecte de données a nécessité un sens aigu de l’observation et une bonne dose de patience!

Malgré l’abondance de l’asclépiade à Scowen, nous avons été surpris et légèrement déçus de ne pas trouver d’œufs ni de chenilles (larves) après plusieurs semaines passées à scruter les plants de nos sites d’étude. Nous avions beaucoup d’interrogations. Avions-nous simplement raté les œufs parce qu’ils étaient trop petits? Les œufs et les chenilles étaient-ils victimes d’un prédateur? Quelque chose d’autre rendait-il cette zone de reproduction moins favorable que nous l’avions espéré? Malgré notre perplexité, nous nous sommes rappelé que le fait de noter l’absence de monarques était aussi une donnée importante. Nous avons donc continué à remplir nos fiches d’observation (fournies par la Mission monarque d’Espace pour la vie) et à téléverser nos données dans leur base.

Au mois d’août, nous avons entrepris l’installation d’une pouponnière sous l’abri du parc. Fabriquée entièrement à partir de matériaux recyclés, cette structure faite de moustiquaires a été installée au début du mois avec l’intention d’y accueillir au moins une chenille. Comme nous n’avions pas trouvé de chenille de monarque au parc Scowen, nous avons décidé d’en « importer » une de la région du lac Brome. Nous avons nommé cet événement « Journée de déménagement du monarque » et avons invité le public à célébrer avec nous l’installation de notre invité spécial dans sa pouponnière agrémentée entre autres de tiges fraîches d’asclépiade.

Des membres de la brigade ont visité la pouponnière tous les jours pour suivre l’évolution des choses. Une fois installée, la chenille s’est occupée à se nourrir d’asclépiade tout en laissant des quantités impressionnantes de chiures au sol. Quelques jours plus tard, elle avait rampé jusqu’au toit de la pouponnière et, le lendemain, elle y était déjà suspendue, prête à se transformer en chrysalide. Le dimanche 20 août, nous avions officiellement une chrysalide!

 

Le stade de chrysalide dure « de 8 à 15 jours en conditions estivales normales » (monarchjointventure.org). Vous vous souviendrez peut-être de la vague de froid que nous avons connue à la fin août. Notre petite amie semble l’avoir remarquée elle aussi! Elle est restée bien au chaud dans sa chrysalide jusqu’à ce qu’elle émerge 18 jours plus tard sous la forme d’un papillon adulte en bonne santé (à ce stade, nous avons pu confirmer qu’il s’agissait d’un mâle grâce aux taches sombres sur ses ailes postérieures). Nous l’avons relâché pour qu’il puisse butiner librement le nectar d’une diversité de fleurs sauvages et se préparer pour son long voyage vers le Mexique.

 

Le rôle de la pouponnière

Lorsque nous avons discuté des différents éléments du projet, la question suivante (très pertinente) a été soulevée : quelle est l’utilité d’une pouponnière?

L’intervention humaine dans les efforts de conservation peut être un sujet controversé. Comment pouvons-nous être certains que nous faisons plus de bien que de mal? Empêchons-nous la nature de suivre son cours? Nous pourrions débattre longtemps de ces questions, et les conclusions sont généralement tirées au cas par cas.

En gros, l’objectif principal de la pouponnière du parc Scowen était de partager la magie avec les gens. En créant un lieu où au moins un monarque pouvait achever sa métamorphose sans être dérangé, nous avons pu présenter les subtilités fascinantes du cycle de vie de cet être vivant. Nous avons exposé et honoré une petite parcelle de la magie de la nature qui se produit tout autour de nous.

Que les gens aient suivi le projet de près ou qu’ils aient seulement vu de petits bouts ici et là, il y a eu beaucoup de moments « wow ». Cela peut paraître anodin, mais ces moments sont puissants. Ils permettent de graduellement développer un souci pour les espèces avec lesquelles nous coexistons. Ce souci peut influencer le développement de nos valeurs et de nos attitudes à l’égard de la nature et imprégner nos habitudes quotidiennes. Même si le chemin n’est pas direct ou linéaire, il est très naturel et repose sur le principe qui veut que « nous avons tendance à protéger ce que nous aimons »… et nous ne pouvons aimer que ce que nous connaissons.

 

Respirer pour la première fois l’odeur délicieuse d’une fleur d’asclépiade, découvrir la relation entre l’asclépiade et la chenille du monarque, apercevoir d’autres magnifiques invertébrés sur les plants d’asclépiade, observer une chenille se transformer en chrysalide en temps réel, voir une chrysalide pour la première fois, découvrir que l’on a confondu pendant tout ce temps le papillon vice-roi (Limenitis archippus) et le monarque… Ce projet a donné d’innombrables occasions d’apprendre, de s’émerveiller et de se rapprocher de la nature.

Enfin, nous tenons à souligner toute l’importance des informations et des ressources mises à disposition (gratuitement) par Mission monarque (Espace pour la vie), Monarch Join Venture et le projet Butterflyway (Fondation David Suzuki). L’ensemble du projet dépendait beaucoup de la contribution de notre super équipe de bénévoles de la Brigade papillons, qui ont consacré des heures à la collecte de données et à la surveillance de la pouponnière, entre autres choses. Nous sommes ravis de tous les aspects de la première édition du projet pour les papillons monarques et nous avons déjà hâte à la suite en 2024!

 


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  • Espèce menacée
  • Espèce parapluie
  • Larve
  • Chiure
  • Chrysalide

Références

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